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Le maître du noir et blanc rêvait de couleurs
Président de la Fondation Pierre Aubert, le professeur Philippe Kaenel s’est attaché à présenter le peintre.

Le maître du noir et blanc rêvait de couleurs

26 septembre 2024 | Texte et photos: I. Ro.
Edition N°3796

Artiste reconnu pour ses gravures en noir et blanc, Pierre Aubert était aussi un peintre. Un livre présente cette facette moins connue.

«Ce qu’il aime fondamentalement, c’est la couleur. Et il passe sa vie à faire du noir et blanc», déclare le professeur Philippe Kaenel, président de la Fondation Pierre Aubert, lors de la présentation d’un livre, samedi dernier dans l’espace dédié à l’artiste vaudois, aménagé au haut de la grange de La Dîme.

Cela peut paraître un paradoxe, mais le président de la Fondation en charge de la gestion de son oeuvre, s’explique: Pierre Aubert s’est fait connaître comme graveur et cette activité lui a permis de gagner sa vie.

Mais l’artiste né aux Mollards-des-Aubert, la plus haute ferme jurassienne habitée toute l’année (1300 m) et située au-dessus du Brassus, avait une vraie passion pour la peinture. Philippe Kaenel situe la naissance de cette véritable vocation au mitan des années vingt lorsque, lors d’un déplacement au Sentier, le jeune homme –il devait avoir 16 ou 17 ans– est captivé par un artiste peintre brossant ses pochades. «Ce fut ma première leçon de peinture à l’huile. Je suis rentré aux Mollards ébloui de couleurs et de rêves», écrit-il dans son journal.

Et l’artiste de poursuivre: «Je rêvais d’atelier et d’expositions. Mais j’étais rivé aux travaux du domaine familial et je n’avais pas d’argent…» Dans le contexte de l’époque et dans une famille libriste (Eglise protestante libre), il paraissait impossible, surtout à ses parents, qu’il s’engage dans une carrière d’artiste. Et pourtant, persévérance et talent lui ont permis d’abandonner progressivement les travaux de la ferme.

Et s’il fallait encore illustrer cet attrait pour la couleur, Philippe Kaenel relève qu’il était passionné par Delacroix, Matisse et Picasso, dont il avait dans son atelier une reproduction de l’oeuvre monumentale Guernica.

Art de la découpe et de la construction, la gravure est un travail de synthèse et de simplification, relève le professeur, raison pour laquelle il appréciait l’oeuvre de Picasso. Et Philippe Kaenel d’ajouter: «Pour comprendre l’oeuvre et la vie d’un artiste, il faut tout prendre en considération.» C’est dans cet esprit que la publication dédiée au peintre et préparée par son fils Raphaël Aubert et Philippe Kaener a été réalisée. Elle permet d’apprécier son oeuvre dans sa globalité.

Une grande richesse

Pierre Aubert était passionné par la nature jurassienne et ses paysages. Mais aussi par la Provence, la région de Nîmes et Paris. «Le voyage à Paris» est d’ailleurs un livre à emporter lorsqu’on monte dans le train en direction de la capitale française.

L’œuvre gravée de l’artiste est déposée au Cabinet cantonal des estampes (Musée Jenisch) à Vevey. Quant à la Fondation Pierre Aubert, elle gère un trésor composé de matrices, bois gravés, dessins, gouaches, aquarelles et dessins au fusain, bref, un énorme matériel à exploiter.

Mais après une année particulièrement riche, marquée par deux expositions à Vevey et à la Fondation Visinand (Montreux), et la publication consacrée au peintre, les animateurs de la Fondation ont besoin de reprendre leur souffle.

Lors de la présentation de l’ouvrage, le professeur Kaenel n’a pas manqué de remercier tous les partenaires qui ont soutenu expositions et publications, de la Fondation Paul-Edouard Piguet à celle de Romainmôtier, en passant par la Loterie Romande et les Communes du Chenit et de Romainmôtier. Mais aussi Frédéric Rossi, l’animateur d’Infolio, qui a conduit l’édition de cet ouvrage de grande qualité, richement illustré et qui révèle des aspects nouveaux de l’artiste.