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La mosaïque d’Achille se dévoile durant trois heures

10 octobre 2013

Quelques privilégiés ont eu l’honneur, hier, de découvrir dans son entier et pour la première fois la dernière mosaïque mise au jour, en 1993, sur le site de Boscéaz, à Orbe. Le vestige, rénové, a été recouvert dans l’enchaînement, peut-être bien pour de longues années…

Myriam Krieg, l’une des restauratrices de la mosaïque d’Achille, au cœur de la fresque.

Quelques privilégiés ont eu l’honneur, hier, de découvrir dans son entier et pour la première fois la dernière mosaïque mise au jour, en 1993, sur le site de Boscéaz, à Orbe. Le vestige, rénové, a été recouvert dans l’enchaînement, peut-être bien pour de longues années…

Une bataille peut en cacher une autre. Et si le départ à la guerre d’Achille, représenté en mosaïques sur le site de Boscéaz, n’était en fait qu’une métaphore à la lutte pour la mise en valeur du site urbigène de l’époque romaine (lire encadré).

L’espace de trois petites heures, «Achille à Skyros» s’est dévoilé à un public d’initiés avant tout. Une mosaïque, représentant un épisode de la vie légendaire d’Ulysse et d’Achille, découverte en 1993. La neuvième et petite dernière pièce du riche site d’Orbe, datant des 2e et 3e siècles, et mis au jour au 19e siècle. Hier, peu après 19 heures, la porte du pavillon qui l’abrite était à nouveau scellée et la mosaïque recouverte, afin de la conserver dans les meilleures conditions… jusqu’à sa prochaine exposition.

Rénové il y a de cela quelques années, le vestige n’avait jamais été rendu accessible au public. Mais le pavillon «provisoire» qui le recouvre a besoin d’être reconstruit. Pro Urba a sauté sur l’occasion pour demander au Canton, propriétaire des lieux, de pouvoir le montrer, le temps d’une visite éphémère.

La mosaïque d’Achille se trouve dans une pièce de réception de l’ancienne gigantesque villa de Boscéaz, située dans un champ de 400 mètres sur 400. Un site connu depuis bien plus d’un siècle, mais dont on a pris conscience de l’ampleur il y a une trentaine d’années, lors de la construction de l’autoroute voisine (son tracé initial était prévu en plein cœur du site archéologique), grâce à des photographies aériennes. Enfouie à seulement quelque 30 centimètres dans le sol, la dernière mosaïque découverte est dans un état de conservation étonnant, malgré les traces d’un incendie. «C’est inouï qu’elle ait si bien survécu dans de pareilles conditions, dans des champs travaillés sans relâche », s’est émue l’archéologue cantonale Catherine May Castella.

Depuis sa découverte en 1993, la fresque de 5,4 sur 9,4 mètres, située dans l’aile ouest de la villa, n’a presque jamais été entièrement visible, ses restaurateurs ayant travaillé par bandes, tesselle par tesselle.

Le temps a fait son effet sur le vestige, qui doit être recouvert afin de ne pas trop souffrir de l’humidité, mais il est désormais prêt à être mis en valeur. Et c’est certainement bien là son talon d’Achille.

 

Un projet de mise en valeur qui stagne

Très rares sont ceux qui ont pu admirer la mosaïque en entier.

Plus de 150 ans après la découverte des huit premières mosaïques de Boscéaz, à Orbe, un groupe de travail emmené par la Fondation Pro Urba oeuvre à la mise en valeur globale du site gallo-romain, qui accueille aujourd’hui 3000 visiteurs par an.

En mauvais état, le pavillon qui protège la neuvième et dernière mosaïque découverte, celle d’Achille, doit être remplacé par un autre, également «provisoire ». «Mais vu ce que ce terme signifie dans le canton de Vaud, on craint que cela ne dure une dizaine d’années», glisse Raphaël Berthoud, le président de la Fondation, dont les derniers contacts avec le conseiller d’Etat Pascal Broulis n’ont pas débouché sur quoi que ce soit de concret, malgré la motion déposée en 2012 par le député Denis- Olivier Maillefer.

Le projet défendu, déjà largement redimensionné, nécessite au moins 4,5 millions de francs. L’idée serait de créer une promenade archéologique pour présenter la villa, la vie des Romains et la végétation de l’époque.

A l’heure de la recherche de fonds, l’attitude prudente du Canton, propriétaire des lieux, ne manque pas de courroucer les élus locaux, dont le syndic d’Orbe Claude Recordon, et les personnes qui s’engagent pour ce site. «Il n’est pas facile d’aller demander des sous en expliquant que l’Etat n’a rien promis », résume Raphaël Berthoud.

Manuel Gremion