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Des bleus au coeur à la patinoire

23 juin 2014

Suisse – France – Une foule impressionnante s’est massée devant l’écran géant d’Yverdon pour supporter la Nati, vendredi soir. Avec l’issue que l’on sait.

© Michel Duperrex

© Michel Duperrex

Tout était réuni pour que la fête soit belle. La foule. Les drapeaux. Le temps clément, pour que les célébrations puissent se poursuivre tard dans la nuit. Et puis il y a eu le match. Retour sur Suisse-France, en direct de la patinoire d’Yverdon.

19h45. La patinoire avait fait le plein pour Suisse-Equateur : il s’agit d’arriver tôt pour avoir une bonne place ce soir. En attendant, d’une terrasse baignée de soleil du centre-ville, on assiste au succès du Costa Rica contre l’Italie. Des outsiders en blanc et rouge qui battent des favoris en bleu. Tiens, tiens.

20h02. Arrivée dans l’arène yverdonnoise, qui se remplit très vite. Maquillage, maillots, perruques : on va s’en mettre plein les yeux. Cloches de vache (normal), klaxons (incontournable), vuvuzelas (euh…): il va y avoir du bruit aussi. La plupart des tables affichent complet. Les supporters les plus jeunes garnissent copieusement les deux gradins. Il ne fallait pas traîner en ville. Ça sent la saucisse grillée et la bière. Tout le monde se dit que ça sent l’exploit.

20h50. Par l’entremise de l’écran, Yverdon passe à l’heure bahianaise. Un Suisse à l’image ? Brouhaha de joie indescriptible. Qu’est-ce que ce sera au moment de l’ouverture du score helvétique ? Un SMS arrive : «On va voir le match à la maison, aucune place pour garer la voiture.» Coup d’oeil en arrière. Pas sûr qu’il y en ait à l’intérieur, de la place. La patinoire est un chaudron, rempli à ras bord, chauffé à blanc. Hymnes nationaux : le charivari est tel qu’on n’en entend rien. C’est parti.

21h07. Steve Von Bergen est au sol. «Ah, ces footballeurs», soupire une mère de famille. Et puis le Neuchâtelois se relève, le visage en sang. Le ralenti : le pied haut levé d’Olivier Giroud, contact. La foule yverdonnoise hue, appelle à un avertissement (au moins), mais Björn Kuipers ne l’entend pas de cette oreille.

21h17. L’attaquant français remet un coup à la Suisse, au figuré cette fois : il inscrit le 1-0 pour les Bleus. Leurs quelques supporters présents exultent. On n’a pas le temps de digérer : Behrami lance parfaitement Benzema dans la profondeur, qui décale Matuidi, 2-0, joue gauche, joue droite, double claque.

21h27. Le public se remet petit à petit de ses émotions. «Il faut qu’on marque avant la mitemps », lâche un fin connaisseur. Et là, Xhaka se retrouve en position et trompe Lloris ! La patinoire explose… Avant de comprendre que le héros du premier match était hors-jeu. Mais on peut le faire ! C’est pas fini !

21H32. Penalty pour la France. Pendant que ça discute, à Yverdon, pour savoir s’il y avait faute ou pas, Benaglio contrecarre l’essai de Benzema. Tout le monde est debout.

21h40. Le tournant du match ? Non : un sursis. But de Valbuena, 3-0, score à la mi-temps. Certains quittent les lieux, écoeurés, convaincus que la messe est dite. D’autres continuent de donner de la voix malgré tout.

22h00. La deuxième mitemps commence et se déroule comme un long pensum. 4-0. 5-0. «C’est la honte », déplore un quadra grimé de rouge et de blanc. Et puis Dzemaili sauve l’honneur, sur coup-franc, avant que Xhaka n’y aille de son petit (et magnifique) but perso. A chaque fois, certains crient et lèvent les bras, comme si la Suisse avait gagné. Mais le score, 5-2, se lit sur les visages fermés des autres.

22h48. Coup de sifflet final. La patinoire se vide. Il n’y aura pas, ce soir, de concert de klaxons dans la nuit yverdonnoise. A la terrasse d’un bar, des supporters refont le match. Pestent. Soupirent. Puis l’un d’entre eux relativise d’une de ces lapalissades que le sport adore : «Mieux vaut une défaite 5-2 que trois 1-0.» Imparable. Mais l’ampleur du revers de ce soir laisse tout de même de sacrés bleus au coeur.

Lionel Pittet